Cette aventure familiale, incroyablement romanesque, débute avec Rodolphe de Habsbourg. En 1273, alors qu'il a cinquante-cinq ans, ce représentant d'une famille noble peu fortunée, originaire d'Alsace, est élu par «les sept princes allemands électeurs», sur proposition du pape Grégoire X. Rodolphe Ier prend ensuite la tête du Saint Empire romain germanique qui, précise l'auteur, «n'est pas une monarchie absolue mais une sorte de contrat associatif pour régler la vie commune dont le maître a le pas sur tous les autres souverains européens».

Choisi parce qu'on le pensait facilement manipulable, et qu'il fallait en finir avec une période d'anarchie qui avait duré un quart de siècle, Rodolphe se révéla être un souverain de grande envergure. À tel point que sa famille régnera jusqu'à ce que, le 11 novembre 1918, Charles de Habsbourg-Lorraine renonce à exercer le pouvoir en qualité d'empereur d'Autriche.

De Charles Quint à Sissi 

Au fil des siècles, l'empreinte des Habsbourg ne cessera pas de marquer l'histoire de l'Europe. Parmi les figures de cette dynastie hors norme, Charles Quint est bien sûr mythique. Ce qui n'empêche pas Jean des Cars d'évoquer le physique ingrat du rival de François Ier. Ainsi, en observant les tableaux de Bernard Van Orley, il évoque la «mâchoire prognathe » du souverain et sa «bouche perpétuellement ouverte ». Une particularité qui fit dire à Charles Quint lui-même, non sans humour, que «ce n'est pas pour mordre les gens». Mais cela n'a certainement pas suffi à rassurer le roi de France…

Les conflits entre les Habsbourg et la France furent récurrents. Ainsi, la courageuse Marie-Thérèse, archiduchesse d'Autriche âgée de vingt-trois ans à la mort de son père, l'empereur Charles VI, dut faire face à une coalition anti-Habsbourg menée par le roi de Prusse Frédéric II allié à Louis XV. De plus, Marie-Thérèse, en tant que mère de Marie-Antoinette, fut accusée, non sans raison, de faire pression sur sa fille, devenue reine de France, afin qu'elle favorise les intérêts autrichiens.

Puis vint la tornade napoléonienne. Elle provoqua la fin du Saint Empire, alors dirigé par François II. Le souverain devint alors François Ier d'Autriche, monarque d'un seul État. Quant à l'incroyable mariage de Napoléon avec Marie-Louise, fille de l'empereur François, il n'empêchera finalement pas une coalition entre l'Autriche et la Prusse, contre la France.

Décidément indestructible, la dynastie des Habsbourg s'illustre encore brillamment avec l'empereur François-Joseph et sa séduisante femme Sissi. Puis, même après la renonciation de Charles Ier en 1918, un souverain assoiffé de paix, le prestige et l'autorité morale de cette famille perdureront. Ainsi Otto, prince héritier né en 1912, sera un farouche opposant à Hitler.

La saga des Habsbourg de Jean des Cars Perrin, 504 p., 22,90 €.